Vous êtes ici : Accueil > Homélies > 2025 > Avance au large !
Homélie prononcée le 8 février 2025
Il me semble que le point commun de ces textes qui viennent d’être proclamés est l’appel à se retrousser les manches pour le Seigneur, à se décarcasser pour lui !
C’est le cas pour Isaïe dans le Temple de Jérusalem. Alors qu’il est en prière, il comprend que Dieu a besoin des hommes, donc de lui, Isaïe, pour se révéler. Chez Luc, l’appel du Seigneur retentit sur les rivages d’un lac (et pas dans le Temple). Les pêcheurs de Galilée, qui ne sont pas des héros ou des supermen, ont devant eux et avec eux un homme qui enseigne la foule depuis leur barque. Et Jésus dit à Simon-Pierre : « avance au large ». D’une certaine façon il lui dit : « Ta vocation n’est pas de pêcher dans ce petit coin du lac, mais bien plus loin pour un autre type de pêche ». Bouleversé et sidéré suites aux résultats miraculeux de la pêche, Ce jour-là, s’est joué un tournant dans la vie de Simon-Pierre. Il porte un autre regard sur Jésus. Lui qui l’a appelé « Maïtre » l’appelle maintenant « Seigneur ». En Israël, c’est le nom qui est donné à Dieu quand on le prie. Jésus rassure Pierre et ses amis de travail et voilà qu’ils laissent tout et le suivent.
Dans la lettre de Paul, nous voici maintenant à Corinthe, ville de quelque cinq cent mille habitants à l’époque. Paul s’adresse à une communauté naissante en pleine ville païenne. Dans cette lettre, il rappelle la foi commune de tous les apôtres. Le cœur de la foi. Paul raconte comment Jésus ressuscité s’est manifesté à Pierre, aux Douze, à plus de cinq cents frères à la fois, et à lui-même. Puis il parle de l’appel qu’il a reçu, comment le Christ lui est apparu de manière inattendue sur le chemin de Damas pour l’appeler à être son apôtre parmi les païens, alors qu’il le persécutait.
Il y a des points communs entre ces textes, mais aussi des différences intéressantes. D’abord les lieux. Au temps d’Isaïe, Dieu se manifeste à un prophète, en un lieu central, une capitale religieuse, un temple sacré. Plus tard avec les apôtres, Jésus choisi de se manifester comme Seigneur dans une région frontière, la Galilée des nations, loin de Jérusalem, et dans une barque de pêcheurs. Enfin c’est à des chrétiens en terre païenne que Paul rappelle l’essentiel de la foi. L’espace des manifestations de Dieu s’élargit. Dans chaque récit il s’agit d’un envoi en mission. Et puis il y a le rapport entre le message à annoncer et le messager. Pas de communication de la foi sans communicateur, sans témoin à qui le Seigneur a confié de prendre la Parole et de la porter. Mais Isaïe, Paul, Pierre, Jacques et Jean ont quelque chose en commun : le décalage qu’ils ressentent entre ce qu’ils sont et la mission qui leur est confiée. Ils ne se sentent pas dignes de parler de Dieu, en son nom. Qui donc est ce Dieu qui fait confiance aux pauvres humains qu’ils sont ? « Faites-moi confiance ». « De même qu’à mon invitation vous avez jeté les filets en plein jour et péché des poissons qui remplissent vos barques, de même, beaucoup, des multitudes, vous entendront et croiront quand vous annoncerez l’Évangile depuis la barque-Eglise » dit Jésus aux apôtres. Mais ce sera peut-être à un moment inattendu. Après que vous aurez peiné toute la nuit sans rien prendre, au moment même où vous serez découragés et vous penserez qu’il n’y a plus rien à faire. Aujourd’hui les temps sont rudes, l’Eglise ne fait plus corps avec la société, l’adhésion à la foi ne va plus de soi. Nos églises sont souvent bien grandes pour nos rassemblements. Professer sa foi demande souvent d’aller à contre-courant de l’opinion commune. Comme j’aime dire, aux yeux de beaucoup, chrétien rime avec crétin.
Tous ceux qui sont appelés à participer à l’annonce de l’Évangile, font la même expérience qu’lsaïe, Pierre, Paul et les autres. Une expérience d’indignité et de peur. Tant mieux ! Ce serait dangereux pour les témoins de l’Évangile de se croire meilleurs que les autres, de s’imaginer que c’est leur propre Parole qui fera œuvre de conversion, alors que ce sera la grâce de Dieu qui agira par eux et avec eux, tout pécheurs et indignes qu’ils soient ou qu’ils se perçoivent. Que les disciples se défendent donc de croire qu’ils exerceront une maîtrise, un contrôle sur le message à annoncer. Ce message leur échappera pour une large part, se transmettra à leur insu. L’Esprit Saint réserve bien des surprises…Il souffle où il veut..
Un autre décalage concerne la disproportion entre la petitesse du messager et la pauvreté de ses moyens et l’immensité de la tâche qui lui est confiée. Isaïe habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures. Les gens vont-ils l’écouter, se convertir ? Paul, quant à lui, l’avorton, le plus petit des apôtres, comme il se qualifie, se trouve face à un énorme défi ! Envoyé dans l’immense monde païen, il lui faudra avec patience beaucoup voyager, beaucoup semer, beaucoup fonder, pour que naissent des communautés. Il lui faudra aussi beaucoup prêcher souvent dans le vide, être rejeté et se heurter à des océans d’indifférence. Il recommandera plus tard à Timothée son disciple, de persévérer comme lui : « Proclame la Parole, insiste à temps et à contre-temps, reprends, menace, exhorte, toujours avec patience et souci d’enseigner. »
Comme Isaïe et les apôtres Pierre et Paul, nous sommes tous appelés par le Seigneur. Il compte sur nous. Il ne s’adresse pas nécessairement aux meilleurs ni aux plus saints. Il n’appelle pas que les enfants sages. Il peut venir nous chercher très loin et très bas. Les grands témoins de la foi sont bien souvent des pécheurs pardonnés. Son appel est toujours le même : “Avancez au large et jetez vos filets.” L’important c’est d’être avec le Seigneur.
La foi et l’Évangile sont des réalités que l’on reçoit gratuitement, mais en même temps on reçoit l’appel à les transmettre. C’est le baptême qui nous fait chrétien et vous les catéchumènes allez bientôt le recevoir…Et le baptême est ce qui nous qualifie pour la mission. Par le baptême nous devenons des témoins de l’Evangile ; nous sommes envoyés pour en témoigner.
À la fin de chaque messe, le prêtre nous dit : « Allez dans la paix du Christ », ou « Allez porter l’Evangile du Seigneur » ou encore « Allez en paix, glorifiez Dieu par votre vie ». Nous sommes envoyés dans la barque « « Eglise » sur les eaux du monde pour être des hommes et des femmes qui, bien que pécheurs, annoncent, comme l’a fait saint Paul, la Bonne Nouvelle du Christ, mort pour nos péchés, mis au tombeau, ressuscité et toujours vivant. « Sois sans crainte » dit Jésus à Simon. N’ayons pas peur aujourd’hui de suivre l’exemple de Simon Pierre et des pêcheurs avec lui sur le lac de Génésareth et disons avec foi « Maître, nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre, mais, sur ton ordre, nous allons jeter les filets ».
Alors ne nous dérobons pas !
Contact
Homélies
Intentions de prière
Intentions de Messe
Certificat de baptême
Diocèse de Grenoble-Vienne - © 2025 - Mentions légales