L’Ascension

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Homélie prononcée le 9 mai 2024

Aujourd’hui nous célébrons l’Ascension du Seigneur. Cette solennité liturgique s’inscrit dans la suite de la fête de Pâques. Elle marque le départ de Jésus qui dorénavant ne sera plus avec ses disciples comme il l’a été avant sa mort et après sa résurrection.
Le récit de l’évangile de saint Marc est très bref. Il résume le tout en quelques mots : « Le Seigneur Jésus, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu. » C’est tout ce que dit Marc.
Saint Luc, lui, en dit davantage. Son récit situe l’épisode quarante jours après Pâques. D’où, en général, la célébration de l’Ascension, le jeudi de la 6e semaine après Pâques.
St Luc nous montre les disciples réunis autour de Jésus dans un repas où celui-ci leur explique que son départ va leur ouvrir un espace nouveau où ils seront les responsables de l’annonce du Royaume : « vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre ». Jésus s’efface et leur promet l’assistance de l’Esprit Saint pour cette mission.
L’Ascension, c’est-à-dire le départ et l’absence de Jésus ouvrent sur une nouvelle présence qui se continuera tout au long du temps. Ce sont désormais les disciples qui sont les messagers de la Bonne Nouvelle. C’est ce que l’évangile de saint Marc s’emploie à développer en s’adressant aux premiers chrétiens et à ceux qui désiraient devenir chrétiens.
En effet, après avoir dit que Jésus a été enlevé au ciel et s’est assis à la droite de Dieu, l’évangile de saint Marc rappelle aux premiers chrétiens qu’ils sont envoyés pour proclamer la Bonne Nouvelle : « Quant à eux, ils s’en allèrent proclamer partout l’Évangile », c’est-à-dire la Bonne Nouvelle.
L’évangile de saint Marc a comme fil conducteur la Bonne Nouvelle qu’est Jésus et son message. En effet, dès les premiers versets saint Marc présente son récit comme l’annonce de la Bonne Nouvelle. Ce récit débute par ces mots : « Commencement de l’Évangile [la Bonne Nouvelle] de Jésus, Christ, Fils de Dieu ». Le départ de Jésus ne change rien à cette annonce de l’Évangile, la Bonne Nouvelle. Ce qui est différent c’est qu’il disparaît de leurs yeux, mais il sera toujours avec eux.
Ils pourront le constater par les signes qui sont énumérés ici. Cette liste apparaît plutôt insolite à nos oreilles (prendre des serpents dans sa main, boire un poison mortel, expulser les démons). Mais c’est par les signes que se révèle la présence du Ressuscité. Les signes sont une forme d’enseignement sur ce qu’il est, sur sa mission et sur son message. Ils sortent de l’ordinaire par leur caractère miraculeux pour nous faire comprendre qu’en Jésus, Dieu agit au-delà de nos attentes et nos vues purement humaines. En Jésus éclate la puissance de Dieu.
Aujourd’hui, regardons autour de nous pour reconnaître des signes semblables adaptés à nos conditions de vie présentes. Sans mettre de côté les signes plus extraordinaires qu’énumère saint Marc, familiers à nos frères et sœurs évangéliques, on peut constater que nos contemporains sont aussi et peut-être davantage rejoints par des gestes de miséricorde, de compassion, d’entraide, de justice que par les guérisons de maladies de toutes sortes dont la médecine peut prendre soin. Soyons attentifs aux signes qui disent la présence toujours vivante de Jésus monté au ciel et assis à la droite de Dieu.
Plutôt que d’imaginer l’Ascension comme la fin d’une belle histoire, nous sommes invités à voir ce mystère comme le début d’une histoire, d’une longue aventure à laquelle nous participons. C’est l’histoire de l’Église qui commence, une histoire remplie de beauté, mais aussi de laideurs, une histoire de sainteté mais aussi de méchancetés. Et pourtant, Jésus prend le risque de quitter les siens pour leur laisser le soin de le rendre présent autour d’eux et dans l’histoire. C’est aux disciples d’aujourd’hui, que revient la tâche de le rendre présent. Ne restons pas là plantés les yeux tournés vers le ciel. Retroussons nos manches pour faire Eglise. Les baptisés s’appuient sur le témoignage de ceux qui ont bénéficié de ces rencontres avec le Christ ressuscité. Alors que les Apôtres ont vu, il s’agit pour nous, qui sommes l’Eglise aujourd’hui, de croire sans avoir vu.
Le temps de l’Église n’est pas le temps de l’absence du Seigneur. L’Église vit de cette promesse qui s’accomplit : « Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui viendra sur vous… Vous serez mes témoins à Jérusalem… et jusqu’aux extrémités de la terre. » La présence du Seigneur à son Église prend une autre forme mais elle est bien là.
 » Cette promesse, confiée aux Apôtres réunis autour de lui au moment de son départ, rejoint et fait vivre l’Église aujourd’hui encore : c’est une source d’espérance qui dépasse tous les calculs, qui défie toutes les prévisions des experts de toutes les époques qui ont pu pronostiquer la disparition de l’Église en analysant ses erreurs et ses fragilités. Depuis plus de vingt siècles, l’Église traverse et surmonte les épreuves, les échecs, les persécutions : même si ce n’est pas toujours évident, elle se remet en cause, se convertit, grâce à cette force qui l’habite, celle de l’Esprit Saint promise par Jésus.
Regardons-nous, car l’Eglise c’est nous, pas les autres : l’Église est composée de fidèles qui restent des pécheurs, des gens qui tournent leur dos à Dieu plus souvent qu’à leur tour. Pourtant, osons reconnaître qu’existe aussi une face lumineuse à l’histoire de l’Eglise dont nous n’avons pas à rougir.
C’est par l’écoute de sa Parole, par sa mise en œuvre, par le partage de son Corps et de son Sang que, nous chrétiens, devenons des signes de sa présence.
La célébration de l’Eucharistie est le lieu premier de la rencontre de Jésus enlevé au ciel et assis à la droite tu Père. Lorsque nous célébrons ensemble, il est là avec nous, intercédant pour nous ; et nous nous unissons à lui dans la liturgie céleste à laquelle nous sommes tous et toutes conviés pour l’éternité.
Alors, à vous tous et toutes, belle fête de l’Ascension !