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Homélie prononcée le 8 décembre 2020
Frères et Sœurs,
Jean-Baptiste est le prophète envoyé par Dieu pour préparer la venue du Christ. Jean-Baptiste est la voix qui crie dans le désert : « Préparez le chemin du Seigneur », nous a dit l’évangile que nous venons d’entendre. Cela ne s’est pas simplement passé en Israël il y a 2000 ans. Cela se passe aujourd’hui, tous les jours depuis 2000 ans. Le Christ vient, et Jean-Baptiste est son prophète qui prépare sa venue dans l’Eglise, dans le cœur des croyants, dans nos communautés. Jean-Baptiste est cet homme rustique et bourru, habillé d’une peau de bête comme le prophète Elie au tempérament de feu. Il attire à lui les foules de Jérusalem parce que c’est un homme fort qui appelle au redressement et au pardon. Mais Jean-Baptiste annonce qu’après lui vient un homme encore plus fort. Et cet homme encore plus fort, c’est Jésus ressuscité des morts et qui donne l’Esprit-Saint. C’est Jésus le Messie dont Jean-Baptiste prépare la venue en nous et entre nous.
Comprenons, Frères et Sœurs, que nous ne pouvons pas recevoir le Christ, si nous ne nous préparons pas à le recevoir. Car le Christ n’est pas violent. Il est doux et humble de cœur. Il n’entrera pas chez nous par effraction. Il n’entrera pas dans nos cœurs et dans nos vies en cassant la porte, mais en frappant jusqu’à ce que nous lui ouvrions. Pour lui 1000 ans sont comme un jour, nous a dit saint Pierre dans la deuxième lecture. Et même si le Christ entre parfois soudainement dans l’existence de certains grands témoins, comme dans la vie de saint Paul par exemple, ceux et celles qui sont ainsi complètement retournés par lui comprennent tôt ou tard qu’ils étaient, en réalité, appelés par Dieu, et attendus par lui, dès le sein de leur mère (Ga 1,15). Nous ne pouvons pas recevoir le Christ brutalement, sans y être préparés, sinon nous ne le verrons pas, et nous ne le rencontrerons pas, lui qui est la lumière du monde (Jn 8,12) et le prince de la vie (Ac 3,15).
C’est pour cette raison que tout ce que Jean-Baptiste représente nous est donné pour nous préparer à recevoir tout ce que Jésus représente, et cela tous les jours de notre vie. Jean-Baptiste représente la conversion, le changement de vie. Et cette conversion et ce changement sont nécessaires pour recevoir efficacement la résurrection du Christ et le don de l’Esprit-Saint. C’est Jésus lui-même qui le dit, dans l’évangile selon saint Luc : « s’ils n’écoutent ni Moïse, ni les prophètes… » - et donc s’ils n’écoutent pas Jean-Baptiste – « …quelqu’un pourra bien ressusciter des morts – moi-même, Jésus de Nazareth - ils ne seront pas convaincus » (Lc 16,31), ils ne bougeront pas, ils resteront tels qu’ils sont.
Autrement dit, Frères et Sœurs, si l’on n’entend pas l’appel des prophètes à se convertir, si l’on reste dans l’impureté, dans la haine ou dans la rancune, alors le Christ ne sert à rien. On vit dans l’illusion d’une vie chrétienne, pas dans la vérité de l’amour qui rend libre et qui sauve. Et, pour paraphraser Isaïe dans la première lecture, si l’on ne comble pas le ravin du mépris entre frères, si l’on n’abaisse pas les montagnes de jalousie ni l’escarpement des paroles blessantes, si l’on n’aplanit pas les sommets de l’exaspération et de la polémique, alors le Christ aura beau ressusciter d’entre les morts, on ne revivra pas avec lui. On gardera le cœur endurci. Et l’Esprit-Saint ne sera qu’une vague ambiance, une atmosphère chaleureuse de spiritualité dans un monde matérialiste et stressé. Mais il ne sera pas la charité au-dessus de tout.
Cela, Frères et Sœurs, nous le savons. Et nous craignons toujours un peu de nous l’entendre dire, parce que nous avons toujours un peu peur de nous y reconnaître. Mais le temps de l’Avent – comme aussi celui du Carême – nous est donné chaque année pour que nous regardions en face notre vie avec Dieu, pour que nous fassions le point sur notre amour pour lui, et, concrètement, notre amour pour nos frères. Or, la bonté de Dieu ne se contente pas de nous envoyer des prophètes comme Jean-Baptiste qui dénoncent nos hypocrisies et démasquent nos médiocrités. Dieu sait bien que nous ne sommes pas toujours prêts à entendre la vérité sur nous-mêmes, et que nous préférons rester sourds à ses appels pour ne pas avoir à changer ce qui nous paraît inchangeable, où à surmonter ce qui nous semble insurmontable.
Et c’est pour cela que la première parole de Dieu qui précède et qui introduit la parole de Jean-Baptiste, sa parole rude et radicale, c’est la parole d’Isaïe que nous avons d’abord entendue, qui est une parole de consolation et de réconfort : « consolez, consolez mon peuple ; parlez au cœur de Jérusalem… dites-lui qu’elle va revenir de son exil à Babylone où elle a été déportée ; annoncez-lui qu’elle ne sera plus dominée par des puissances étrangères, qu’elle va rentrer chez elle et retrouver son autonomie, et qu’elle va pouvoir se reconstruire ».
Frères et Sœurs, Jérusalem la cité trois fois sainte, c’est chacun d’entre nous et c’est nous tous ensemble. Dieu ne nous redit pas durement, par Jean-Baptiste, que nous devons nous convertir, sans d’abord nous annoncer, par Isaïe, la fin de nos exils, de nos aliénations, la guérison de nos blessures, la restauration de nos capacités. Dieu ne nous envoie pas Jean-Baptiste et sa rudesse, en nous disant que nous devons changer, sans d’abord nous consoler par Isaïe, en nous disant que nous pouvons changer. Mais nous ne pourrons changer qu’à une seule condition, c’est que nous croyions en Dieu, que nous ayons foi en lui quand il nous parle d’espérance par la voix des prophètes. Frères et Sœurs, nous ne croirons pas en Dieu parce que nous aurons changé. Nous aurons changé parce que nous aurons cru en Dieu.
Dieu tendre et miséricordieux nous annonce que nous sommes capables de regarder nos fautes en face et d’arrêter de mentir, de prendre notre vie en main et de cesser d’être des victimes, pourvu seulement que nous entendions sa parole de consolation, sa promesse de restauration, et que nous y croyions de tout notre cœur. Être consolés, revenir d’exil, c’est entendre que le mal est toujours possible en nous et autour de nous, mais que ce mal n’est plus une fatalité ni une nécessité, parce que nous pouvons changer quelque chose à notre monde et à nos vies, et répondre alors – mais alors seulement - aux appels de Jean-Baptiste à redresser nos chemins tortueux, et à renverser les obstacles à la grâce.
Alors nous comprendrons que, malgré les apparences, les remontrances des prophètes sont des signes de la tendresse et de la fidélité de Dieu. Et nous pourrons nous préparer à recevoir le Christ. Nous pourrons recevoir l’homme plus fort qui fait ce que Jean-Baptiste ne fait pas. Nous pourrons goûter dès ici-bas la puissance de la résurrection, et, au cœur-même des maladies, des conflits, des souffrances et des morts, tout vivre dans l’amour fort et intime de celui qui renouvelle la face de la terre, parce qu’il est la source de la vie et le créateur de toute chose.
Nous allons bientôt accueillir l’enfant de Bethléem, le sauveur que le monde attend. Ayons nous-même un cœur d’enfant qui se laisse consoler par ses parents – c’est-à-dire par Dieu Notre Père et par l’Eglise Notre Mère – pour avancer sur le chemin de l’amour à la rencontre de l’éternité, dans la joie et dans la paix. Amen.
Père Patrick Faure
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