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Homélie prononcée le 24 novembre 2019
Frères et Sœurs,
Le Christ est le roi de l’univers parce que l’univers est créé par rapport à lui et pour lui. C’est ce que saint Paul nous a dit dans la deuxième lecture (Col 1,16). Tous les êtres visibles et invisibles sont créés en référence au Christ et en vue de lui, parce que le Christ est ressuscité des morts, et parce qu’il est lui-même la résurrection et la vie, comme il le révèle à sainte Marthe, dans l’évangile de saint Jean (Jn 11,25).
Le Christ Jésus, crucifié sous Ponce-Pilate et ressuscité le troisième jour, est l’alpha et l’oméga, le commencement et la fin de toute chose nous dit l’Apocalypse (Ap 22,13). Il est le prince de la vie (Ac 3,15) non seulement sur la terre mais aussi dans l’univers entier, parce que, en tout point de l’univers où il y a la vie, la vie la plus élémentaire ou bien la plus sophistiquée, cette vie est créée par Dieu et appelée par Dieu à devenir la vie éternelle du Christ ressuscité.
Car la résurrection n’est pas seulement terrestre. Elle est cosmique. La résurrection de la vie n’est pas seulement le prolongement plus ou moins artificiel de la vie dans les organismes qui lui servent de support, avec toutes les mutations qui peuvent en découler. La résurrection d’un être vivant n’est pas seulement son évolution progressive et graduelle vers des niveaux d’existence de plus en plus élevés physiquement ou mentalement, non. La résurrection, c’est la reprise et la transformation de l’être tout entier, corps et âme, qui entre dans la gloire de Dieu.
Et la gloire de Dieu qui s’est révélée sur notre humble et petite planète n’est pas une puissance qui se mesure en kilowatts. Elle n’est pas l’énergie d’un champ magnétique ou d’une onde lumineuse. La gloire de Dieu n’habite pas un espace qui serait mesurable en années-lumière ou même qu’on estimerait incommensurable à l’image des milliards de galaxies parce qu’il serait inimaginablement immense. Non, Frères et Sœurs. La gloire de Dieu qui habite l’univers – « le ciel et la terre sont remplis de ta gloire », disons-nous dans le sanctus - n’est pas aux dimensions de l’univers. Avec un brin d’humour on pourrait même dire qu’elle y est à l’étroit, parce que la gloire de Dieu, comme Dieu lui-même, est transcendante. Elle transcende l’univers et ses merveilles. Elle est d’un autre ordre que le cœur et la pensée des hommes ne peuvent découvrir que par intuition et par révélation.
Cet ordre, c’est celui de l’amour éternel créateur et sauveur de toute chose. Et cette gloire de Dieu, c’est la résurrection et la vie éternelle. C’est Jésus lui-même, Christ et Messie d’Israël et des Nations terrestres, roi de l’univers au-delà de tout ce nous pouvons « concevoir ou imaginer », comme le dit l’épître aux Ephésiens (Ep 3,20).
Et le vertige ne s’arrête pas là, Frères et Sœurs. Il continue quand on entend que cette royauté universelle du Christ s’est faite petite, à taille humaine, et s’est abîmée dans la vie d’un être humain crucifié à Jérusalem il y a 2000 ans. Vertige de l’amour infini qui nous épouse jusque dans nos douleurs pour nous remplir de sa présence en toute situation de vie et de mort.
Dans l’évangile que nous venons d’entendre, le bon larron est crucifié à côté de Jésus. Il voit Jésus défiguré par la torture et méconnaissable, mais pourtant il croit en lui et il se confie à lui comme à un roi. Il ne lui demande pas de le faire descendre de sa croix, mais de le faire entrer dans son royaume. Et Jésus lui répond : « aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis » (Lc 23,43), parce que le paradis c’est d’être avec Jésus, c’est-à-dire avec le roi, le roi des rois.
Le bon larron ne sait sans doute pas que l’amour divin qui est dans le cœur du Christ est capable de ressusciter les morts et de recréer la vie à partir du néant et de la disparition totale. Mais il pressent que celui « qui en a sauvé d’autres » par ses miracles et par ses guérisons tiendra sa promesse d’aller auprès de Dieu préparer une place pour ses disciples, et de revenir les prendre pour qu’ils y soient avec lui pour toujours (Jn 14,3). Le règne du Christ est à l’œuvre en tout lieu de l’univers où l’amour transforme la vie et la mort pour les ouvrir à la sainteté de Dieu et à son éternité glorieuse et bienheureuse. Cela est vrai pour la terre et pour tout autre lieu de l’univers, car toute vie vient de Dieu, son créateur et son sauveur. Voilà, pourrait-on dire, pour la dimension spirituelle de cette royauté de Jésus que nous fêtons aujourd’hui.
Cela étant, vous le savez, Frères et Sœurs, dans sa dimension historique, la célébration du Christ-Roi de l’univers est une célébration récente. Elle a été instituée en 1925 par le pape Pie XI à cause du marxisme et du communisme qui se répandaient en Europe de l’Est. La fête solennelle qui fait prendre conscience de la royauté du Christ est donc née dans un contexte très lié aux différentes situations politiques dans lesquelles l’Eglise est amenée à vivre au milieu du monde. A cause de ce contexte très marqué du XIXe siècle, le règne du Christ est souvent compris – et c’est légitime - comme désignant surtout l’influence du Christ sur la vie des sociétés, c’est-à-dire concrètement l’influence du christianisme, de l’Eglise et des chrétiens sur la marche du monde.
On en vient alors à faire des analyses à grande échelle. Et on se dit qu’après le XXe siècle et le choc frontal de l’évangile avec les idéologies totalitaires en Russie et en Allemagne et les destructions massives des guerres mondiales, notre XXIe siècle connaît plutôt une confrontation plus diffuse et plus globale de l’Evangile avec d’autres idéologies pas moins totalitaires qui, par le biais de spéculations variées, financières ou technologiques, sont toujours au service de la loi du plus fort, avec ses impacts dégradants sur l’être humain et sur son environnement. Et face à ces nombreux défis, l’Eglise a pour mission d’annoncer l’Evangile à nouveaux frais.
Le pape Benoît XVI et le pape François, avec les évêques et les experts, font entendre la parole et la pensée du Christ sur les questions techno-économiques et les questions sociétales soulevées par les dérives bioéthiques et les crises écologiques. Et plusieurs de nos contemporains qui éprouvent un besoin de salut pour la planète, indépendamment de toute appartenance confessionnelle, finissent par découvrir que la vie chrétienne porte en elle un principe de réalité, d’espérance et de fraternité qui répond à leur souci de « prendre soin de la maison commune », pour parler comme le pape François (Laudato si). Il y a donc certainement là, Frères et Sœurs, un contexte propice à un dialogue fécond entre l’Eglise et le monde, et propice à une perception juste et bonne du règne du Christ et de son rayonnement.
Mais vous le savez bien, Frères et Sœurs, en son fond et en son âme, ce règne, ce royaume du Christ, n’est pas celui des idées, encore moins des idéologies, des convoitises et des intérêts partisans. Le Christ Jésus est roi par le bois de la Croix, c’est-à-dire par la puissance de son amour qui transfigure toute chose, toute vie, toute mort et toute souffrance en y apportant le silence et la présence de Dieu au-delà de toute parole et même de toute pensée. Et c’est dans le mystère inconcevable de cet amour que tout se réordonne et retrouve du sens.
Le royal amour du Christ est un amour qui guérit, qui fait revivre, et qui purifie la mémoire pour que la justice et la paix règnent autant dans les cœurs que dans les sociétés.
Accueillons donc maintenant celui qui nous apprend à aimer comme il aime pour que nous puissions dès ici-bas goûter quelque chose de notre bonheur éternel, et pour partager ce bonheur à notre monde. Amen.
Père Patrick Faure
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